Une mise en oeuvre d’énergies

La Voûte céleste offerte à notre comtemplation

Il nous apparaît d’abord que «voûte céleste» et «voûte étoilée» ne signifient pas exactement la même chose. Nous nous attachons à méditer ici sur les cieux entourant notre planète, sans oublier le plafond étoilée du temple maçonnique.

F. P.-G. (Revue maçonnique suisse: décembre 2003)

On perçoit en général le ciel comme une couverture de la terre, le tout formant une espèce de grotte. Ainsi peut-on rapprocher la voûte céleste de la voûte du palais dans la bouche, organe par lequel s’émettent pensées, sentiments et opinions. S’y associe la voûte crânienne où s’élabore tout ce que nous exprimons. Mais elles sont rigides et fermées, à l’image exemplaire de la grotte de Lascaux. Or, la voûte céleste s’ouvre au contraire sur l’infini.

On peut relever à cet égard le caractère trompeur de notre vision du ciel étoilé. Nous n’y percevons pas les distances réciproques entre les astres eux-mêmes et notre globe. Nous voyons aussi luire des étoiles d’une clarté posthume car, en fait, elles sont déjà éteintes.

Il n’empêche que l’être humain a pu découvrir que l’Étoile polaire offre un repère au voyageur pour le guider dans sa marche nocturne. Nous noterons également que les phases de la lune ont une incidence sur nos comportements collectifs. Donc, sur un plan strictement sensoriel, selon l’observation à l’oeil nu, la voûte céleste, de nuit en particulier, se cache et se découvre un peu comme cette «lumière douteuse» montrée au néophyte par le rituel d’initiation de «La Vraie Union».

Les ambiguïtés ci-dessus s’effacent lorsque notre contemplation de la voûte céleste nous amène à méditer sur le plan symbolique. Nous constatons alors l’émergence de forces positives venant à nous de la voûte céleste nocturne.

Elle favorise la réflexion; souvent l’insomnie ou un réveil très matinal engendrent de bonnes décisions. La nuit permet aussi de percevoir certaines choses que cachait l’éclat du jour. Et l’apparente immutabilité des astres les uns par rapport aux autres en une lente rotation où chaque étoile ou planète garde sa place, nous pénètre d’un sentiment de respect. Il faut pour cela bien sûr que la voûte céleste nocturne s’offre à notre regard dégagée de tout voile nuageux.

La lune est naturellement évoquée, douce et redoutable tout à la fois. Jadis dans nos campagnes on couvrait les fontaines pour éviter que les animaux boivent le reflet de son image.

La voûte céleste est également inséparable du soleil, mais quand il se lève nos yeux ne distinguent plus les étoiles. À l’inverse, nos temples, eux, nous montrent en simultanéité le soleil, la lune et la voûte céleste étoilée. Cela met en évidence une figuration de type cosmique, à savoir globalisante et nous nous retrouvons ainsi sous un ciel d’architecture, immobile, rassurant, d’où ne tombera aucun aérolithe susceptible de venir ravager, voire anéantir notre globe terrestre. Pur et sans tache, tout en symbole, s’y déroule le cycle des saisons avec ses deux pointes solsticiales.

Il nous a encore semblé que le Ciel serait comme une porte, celle de nos origines et celle de notre au-delà. Ne dit-on pas aux petits enfants qu’une personne décédée est allée au ciel et nous autres francs-maçons n’avons-nous pas adopté l’expression «Orient céleste»?

Selon une très antique intuition, les hommes tendent à croire que l’on peut agir sur un être ou un aspect de la nature (arbre, rocher, etc.) en refabriquant son image. A Lascaux, les taureaux peints visaient très probablement à enclencher une captation magique.

Il en va de même dans un bâtiment aussi significatif que le Panthéon de Rome. La cime de sa voûte solaire, ouverte sur un monumental axe du monde, relie magiquement le ciel à la terre. Là nous pouvons entrer dans cet axe, le capter, du zénith au nadir. Et, de là aussi, l’axe panthéonique peut nous devenir refuge secourable, quel que soit le lieu où nous aurons porté nos pas, à la ressemblance de ce long fil à plomb que l’on voit accroché à la voûte étoilée de certaines loges.

En son premier Livre d’Architecture Vitruve mentionne la bienséance comme l’une des cinq caractéristiques de l’art de construire. Par bienséance l’illustre Romain entend que tout bâtiment (et le temple en particulier) sera conçu et réalisé de façon que ses utilisateurs puissent y mettre en oeuvre les énergies spirituelles nécessaires (le divin, pour ceux à qui ce mot convient). Ainsi, déclare Vitruve: «on ne fera pas de toit au Temple de Jupiter tonnant, ni à celui du Ciel, non plus qu’à celui du Soleil et de la Lune : ils seront découverts, parce que ces divinités se font connaître en plein jour et par toute l’étendue de l’univers». La lune en plein jour, en même temps que le soleil? Oui, en un ciel dégagé, à l’aube et au crépuscule, comme chacun peut l’observer ! Alors seulement la vision de la voûte céleste s’accorde à celle de nos voûtes étoilées où ces deux «divinités », selon Vitruve toujours, s’offrent à notre contemplation, non de manière fugitive, mais en permanence. Elles nous proposent cette conclusion morale: si nous sommes chacun, intimement, une voûte étoilée sachons sortir de nos temples avec un ciel intérieur «bienséant», soit libre de toute nuée porteuse d’orage!