Travailler à l’exercice de ce qui Est

Un outil d’élévation, la symbolique ? La Franc-maçonnerie la propose pour « porter à un degré supérieur, accéder à un niveau supérieur », comme le définit le dictionnaire.

L’élévation pousse au perfectionnement de l’humain, mais est-il perfectible ? Dès l’entrée en Franc-maçonnerie, c’est la transformation de la Pierre brute en Pierre cubique parfaite qui est présentée, un symbole emprunté à la matière inerte, car émanant des constructeurs. Il importe, cependant, de ne pas en cacher l’insuffisance. En effet, chaque Frère est lui-même cette Pierre; elle n’est donc pas une pierre de construction, puisque la Pierre cubique conduit à la progression, à la Pierre cubique à pointe, qui représente La Construction, Le Chemin. L’attitude de recherche permanente, de travail par la mise en lumière du quotidien et par l’apprentissage du langage du symbole assument la médiation entre l’humain et le Grand Architecte de l’Univers, pour donner sens et cohérence au monde invisible. On le voit par le lien entre les symboles qui conduit d’étape en étape, dans une progression cohérente sans cesse renouvelée et éclairée.

Cette démarche se développe aussi à l’échelle du Tout, de la globalité. Elle ne se rapporte pas à un sous-ensemble quel qu’il soit, comme celui du collectivisme, par exemple. « Libre et de bonnes moeurs », ce simple et sage rouage des exigences de l’humain dans la société ne saurait se substituer à la modification et à la transformation de sa nature même. En effet, « Libre et de bonnes moeurs » est une condition sine qua non pour bénéficier de la symbolique. « Passer des ténèbres à la Lumière », cette expression à l’origine de notre Ordre remet ainsi les choses à leur place originelle. La venue à la Lumière, cette « plusvalue », ou élévation dans le domaine de la Connaissance, est véritablement la gageure de la Franc-maçonnerie. Dès lors, la vue, sensation la plus objective, devient partie intégrante de soi-même. L’Extérieur devient un Intérieur agissant sur la nature de l’humain et l’Extérieur va ensemencer cette nature intérieure. Mais de quelle semence peut-il s’agir ? L’oeuvre du Grand Architecte de l’Univers, la Nature Univers, le monde, la société ? Enrichissement intérieur ou appauvrissement ? Il ne peut y avoir de développement de l’humain que par sa relation avec plus grand que lui.

Passer de l’oeil photographique à l’oeil radiographique, du perçu par les sens, au perçu par le bon sens, suppose un cheminement progressif. Un cheminement au sein d’une symbolique qui prend le relais du langage des mots, restreints dans leur acception, pour donner accès au langage direct de l’OEil éclairé et éclairant, à l’exemple du Temple ouvert sur l’Univers et fermé au monde profane.

La symbolique, si elle a ses propres limites, est initialement basée sur le tangible pour permettre de travailler à l’exercice de ce qui Est. Elle fait renoncer aux certitudes et illusions. L’éclairage de valeurs nouvelles est alors amorcé et la métamorphose de l’Initié et de son monde intérieur va s’éclairer à la mesure de son détachement progressif aux valeurs anciennes. La symbolique, par sa cohérence, permet une progression dans la Connaissance et, de ce fait, élève à une vision plus globale, universelle.

Frère Gérald Mayor
de la Loge « Les Frères Inconnus de Memphis »,
Orient de Lausanne