Priorité aux valeurs essentielles

Entretien avec le Grand Maître de la GLSA Alberto Ménasche

(Revue maçonnique suisse: juin/juillet 2004)

Le samedi 1er juin, lors de l’Assemblée des Délégués à Fribourg, Alberto Ménasche était élu Grand Maître de la Grande Loge Suisse Alpina, ainsi que ses quatre collaborateurs, formant à eux cinq le Comité Directeur pour la période 2002-2006. C’était la deuxième fois que la région italophone de notre pays présidait aux destinées de l’obédience. Nous avons tenu à recueillir les impressions et sentiments de l’intéressé parvenu à michemin de son quadriennat.

Alpina: Arrivé à la moitié de ton mandat quel regard portes-tu sur les deux années écoulées?

Alberto Ménasche: La plus grande satisfaction du Comité Directeur est de constater avec quel enthousiasme les loges ont répondu à son appel pour développer le thème de l’instruction et lui accorder une place privilégiée dans leurs travaux. Tous les frères de notre Obédience doivent être informés quant aux fondements et à l’essence de notre ordre afin d’être, notamment, en mesure de répondre de façon adéquate, exhaustive, et en connaissance de cause aux nombreuses et souvent insidieuses questions qui nous sont posées dans le monde profane. Tel était précisément l’objectif prioritaire que nous nous étions fixé pour les deux premières années de notre fonction.

A.: Les priorités seront-elles les mêmes pour les deux ans à venir?

A.M.: Pour la deuxième année nous avons invité les loges à méditer et à travailler sur le thème conjoint de la tolérance et de la fraternité. La société profane a beaucoup changé ces vingt dernières années. L’être humain ne se trouve plus au centre de notre civilisation, lacéré qu’il est par l’arrivisme, l’ambition du succès et du profit immédiats. Nous devons pour notre part rester fidèles aux valeurs essentielles que sont l’amitié, la solidarité, la fraternité, la tolérance, l’éthique, la morale et la justice. La croissance et l’évolution de l’ordre initiatique appartiennent à la maçonnerie, c’est-àdire aux frères euxmêmes dans leur développement spirituel, perfectionnement qui se manifeste en particulier dans la pratique de la tolérance et de la fraternité. Le Comité Directeur se penche actuellement sur les thèmes que nous aurons à soumettre à la prochaine assemblée des Maîtres en Chaire et Maîtres Députés, thèmes destinés à être développés au sein des loges. Je n’en dirai pas plus mais je puis t’assurer que nous sommes décidés à relever un défi important pour notre ordre, dans l’espoir que nos ateliers le relèveront à leur tour afin que la maçonnerie soit dans le monde profane reconnue et acceptée pour ce qu’elle est réellement.

A.: Comment perçoistu la vie de nos ateliers, toutes régions confondues?

A.M.: Je constate avec satisfaction que nos ateliers affirment avec vigueur les principes d’universalité qui sont les nôtres. Dans presque chacun d’entre eux existe la volonté d’agir conformément à un esprit de compréhension et de tolérance. Le respect réciproque et celui des opinions d’autrui, la disponibilité au dialogue et à la confrontation des idées – qu’elles relèvent du religieux ou du philosophique -, la faculté de modifier ses propres idées en les libérant de préjugés sont des composantes des travaux dans nos ateliers. Nous assistons à une volonté sincère de renoncer à certains comportements dogmatiques et à se libérer du joug des superstitions et des idées préconçues. Quelques petites loges ont des difficultés, leur effectif n’étant pas suffisant à leur développement. Quelques autres loges sont litigieuses mais cela est dû à certains de leurs membres qui peinent à faire la différence entre notre ordre et une association profane.

A.: Ton plus grand motif de plaisir lors de tes visites?

A.M.: Les visites que j’ai eu l’occasion de faire ont été pour moi très riches d’enseignement. Les contacts avec nos frères m’ont permis de constater le sérieux avec lequel les travaux se font dans nos loges, toujours dans le respect de nos Principes généraux et de notre Constitution. Par ailleurs, les rapports que nous adressent régulièrement les Maîtres en Chaire et les Maîtres Députés, analysés avec le plus grand soin, nous confirment la volonté des organes dirigeants des ateliers de l’Alpina d’être à l’écoute des frères et de poursuivre les travaux dans la voie tracée par nos prédécesseurs sur leur parcours initiatique.

A.: Quels sont les aspects de nos loges qui mériteraient d’être développés?

A.M.: Les membres de nos ateliers vieillissent, nos principes restent actuels. Tout doit être mis en oeuvre dans nos loges afin de rendre la maçonnerie attrayante aux «jeunes». Nous devons en effet leur offrir plus que ne leur offrent les autres associations. La maçonnerie est une idée moderne.

A.: Suite à tes voyages dans le cadre de ta Grande Maîtrise, quelle est l’image de la GLSA à l’étranger?

A.M.: La GLSA jouit d’un très grand prestige à l’étranger. Ce prestige, elle le doit avant tout à sa stabilité intérieure et à son respect de la Tradition. Aujourd’hui plus que jamais elle est sollicitée par les pays de l’ex-Union Soviétique pour les aider à se construire dans le cadre de la Tradition et de la régularité. L’objectif du Comité Directeur en matière de politique étrangère consiste à être à l’écoute de ces nouvelles obédiences et apporter son expérience et son savoir-faire pour que la maçonnerie se développe selon les principes énoncés et reconnus.

A.: Que t’apportent sur le plan personnel toutes ces rencontres fraternelles?

A.M.: Beaucoup de satisfactions! Surtout quand je me trouve face à des frères sincères qui croient en ce qu’ils font.