L’égrégore et son énergie

Pour le franc-maçon, travailler à plusieurs est plus efficace qu’en solitaire

Loge EOS, Lausanne (Revue maçonnique suisse: mars 2008)

Egrégores: nom masculin pluriel, du verbe grec égrêgorein signifiant veiller. Les égrégores étaient dans les légendes juives, des anges qui, selon le Livre d’Enoch, s’unirent aux filles de Seth et engendrèrent les Géants, appelés ainsi parce qu’établis sur le Mont Hermon ils jurèrent d’y «veiller» jusqu’à ce qu’ils eussent possédé les filles des hommes.

Il semble qu’il ne faille pas chercher là l’origine probable de l’égrégore dont parlent les francs maçons, bien que l’idée de veilleur que l’on découvre dans l’origine grecque du mot n’est pas sans rapport avec notre travail. Sur Wikipédia, on peut lire ceci: «En ésotérisme, un égrégore est une force mentale puissante, créée et maintenue en activité par la forme pensée de nombreux individus unis dans un but commun. Une fervente prière collective, la montée du nazisme sous Adolf Hitler, les préjugés hérités de notre milieu, social culturel ou religieux sont tous des égrégores qui conditionnent selon leur ampleur la façon de penser de chacun».

Auteur de La Kabbale pratique, Robert Ambelain écrit: «On donne le nom d’égrégore à une force engendrée par un puissant courant spirituel et alimentée ensuite à intervalles réguliers, selon un rythme en harmonie avec la Vie universelle du Cosmos, ou à une réunion d’entités unies par un caractère commun. Dans l’invisible hors de la perception physique de l’homme, existent des êtres artificiels, engendrés par la dévotion, l’enthousiasme, le fanatisme, qu’on nomme des égrégores». On constate dans cette dernière définition un doux mélange des deux notions.

Si l’on cherchait la source du mot dans le latin on trouverait, pour nous maçons, l’étymologie la plus parlante: ex = sortant de, puis gregs, gregis = le troupeau, la foule, l’ensemble. Il s’agirait dès lors de l’énergie qui pourrait émerger d’une réunion. De tout temps les occultistes ont exploité ces énergies. En occultisme on entend souvent parler d’égrégore. De quoi s’agit-il exactement? En fait, on appelle égrégore l’ensemble des énergies cumulées de plusieurs personnes vers un but ou une croyance défini par elles. Nous serions en présence d’un champ d’énergie à la fois mentale, émotionnelle et spirituelle. L’action serait réciproque, à savoir que les individus alimentent l’égrégore et celui-ci agit sur eux. La puissance de l’égrégore serait fonction du nombre de ceux qui le maintiennent et de l’intensité de leur engagement dans le projet commun.

L’égrégore serait ainsi comme l’accumulateur d’une énergie possédant ses propres caractéristiques, et motivé par la foi ou la concentration de plusieurs personnes simultanément. On peut noter au passage que dans Matthieu, chapitre 18, verset 20, Jésus dit: «Là où deux ou trois seront réunis en mon nom, je serai au milieu d’eux». Les chrétiens s’en inspirent pour créer un égrégore. Il faut cependant savoir que la religion n’est pas la seule à créer des égrégores.

En Amérique, et maintenant en Europe, fleurissent au sein des hôpitaux des «groupes de prières» priant pour la guérison des malades qui le leur demandent. On a constaté que par ce procédé ceux atteints d’une maladie grave se remettaient beaucoup plus rapidement et avaient des chances de guérison considérablement plus élevées que ceux ne bénéficiant pas de ces interventions. Tout simplement parce que le groupe en question canalise, par sa dévotion, une «énergie de guérison» fusionnant avec celle du patient et le renforçant dans sa lutte contre la maladie. Voilà un excellent exemple d’égrégore. Il en va de même pour l’activité professionnelle: vous travaillez dans une entreprise qui vous demande de constituer un groupe afin de réaliser un projet. Si dans votre groupe tous les membres sont soudés, sur la même longueur d’ondes, le projet sera terminé en un rien de temps et vous bénéficierez des félicitations de vos employeurs. Si au contraire il se trouve une ou plusieurs personnes démotivées, l’énergie développée par votre groupe sera quasiment nulle ou très négative, les idées manqueront, votre travail n’avancera pas, le moral de vos «troupes» sera au plus bas et vous essuierez un cuisant échec. Il eut été préférable de faire le travail seul, ça aurait été plus long mais bien moins difficile car sans entrave à sa réalisation.

Un égrégore n’est a priori ni bon ni mauvais, il représente la somme des énergies psychiques émises par les participants, et cette énergie neutre se colore pour le meilleur ou pour le pire des intentions du groupe. En retour l’égrégore exercera une puissante influence sur les membres du groupe.

En franc-maçonnerie on utilise le mot égrégore pour décrire un phénomène où les pensées s’unissent dans un même but mental, spirituel ou émotionnel. Leur puissance pendant ces moments exceptionnels que sont les tenues et plus particulièrement lors de la chaîne d’union est considérée comme supérieure à l’addition de chacune des pensées individuelles. Cela signifie de manière générale que plusieurs frères pensant et travaillant ensemble sur une idée auront par la somme de leurs réflexions plus d’efficacité que si chacun d’eux avait oeuvré séparément. Les maçons, ne l’oublions pas, sont des initiés grégaires, non des mystiques isolés.